JESUS, LE PAUVRE
« Jésus
dit : Permets-lui d’avoir gardé cela pour le jour de ma mise au tombeau.
Car les pauvres, vous les avez toujours avec vous ; mais moi, vous ne
m’avez pas toujours. » Jn 12:7-8
Nous sommes peu
avant le jour de la crucifixion, à Béthanie. Au cours d’un repas, une femme,
Marie, profite de l’occasion pour briser un vase plein d’un parfum très
précieux sur le Seigneur. Les disciples, au premier rang desquels Judas,
regrettent le gaspillage d’une telle somme, arguant qu’elle aurait pu servir à
faire du bien aux pauvres. En effet, la scène a des aspects choquants. Le
parfum répandu représentait une somme gigantesque : 300 deniers, soit environ
une année de travail d’un ouvrier. Dans les conditions de vie actuelle en
Europe occidentale, cela équivaudrait à 15 000 euros environ !
Plusieurs
interrogations surgissent. La première concerne Jésus : pourquoi a-t-il,
pour ainsi dire, « besoin » de ce parfum ? Pourquoi
donne-t-il raison à Marie et non à ses disciples ? N’a-t-il pas prêché le
dénuement, le renoncement, le souci pour les pauvres, la générosité ? La
dernière phrase de l’épisode semble presque égocentrique : « Mais
moi… » N’est-il pas le Dieu infini, autosuffisant ? En fait, il nous
faut des phrases telles que celle-ci pour toucher du doigt la réalité et la
profondeur de l’humanité de notre Seigneur et ce que cela lui a « coûté. »
C’est pourquoi il a pleinement apprécié le geste désintéressé d’une personne
qui était entrée un peu dans ce qu’il allait vivre : la mort sur la croix.
Il a osé se présenter comme un « pauvre » parmi les pauvres, ayant
besoin de l’affection humaine. Nous « permettons-nous » de
voir Jésus ainsi ?
La seconde
interrogation concerne le rapport entre le religieux et le social. Trop
souvent, au cours de l’histoire de l’Église, on a sottement opposé ces deux
aspects, les uns insistant sur l’adoration légitime et la primauté à donner à
Dieu, les autres rétorquant qu’aimer Dieu réellement passe par l’amour du
prochain. Évangélisation versus adoration, humanitaire contre enseignement, le
débat continue. Jésus, dans sa perfection unique, sait en deux versets rétablir
l’équilibre : nous avons toujours les pauvres avec nous et nous en
souvenir est le devoir permanent et inévitable des chrétiens (Ac 20:35) ;
mais, au-delà de cet acte unique de Marie pendant l’incarnation de Christ, le
Seigneur appréciera un geste fait par amour pour lui, désintéressé, peut-être
fou à notre vue humaine rationnelle.
Aimons
donc Jésus, le pauvre, et les pauvres avec lui.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire